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L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre

Publié le par J. Demotz

L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre

Sur la longue route entre nos terres et Marseille, en descendant le Rhône, se trouve une petite ville, nommée Orange. A notre époque, cette ville n'est rien de plus qu'une cité du Sud de la France, guère plus grande que notre ville de Vevey.

Mais cette ville repose sur des fondations lui conférant une aura allant bien au-delà de sa taille actuelle. Si l'on remonte quelque peu dans le temps, au XIIème siècle apr. J.-C., elle est le siège d'une principauté, battant monnaie et jouant un rôle important dans la politique européenne du temps. Une chanson consacrée au Prince d'Orange s'entend encore de nos jours autour des feux de camps. Mais ce ne sont ni le sujet ni la période qui nous intéressent. Il faut remonter encore plus en arrière dans le temps.

En 35 av. J.-C., la ville, qui sera nommée Arausio, est fondée sur le territoire des Tricastins par des vétérans d'une légion gauloise. L'histoire ne manque pas d'humour, car c'est dans les environs que s'est déroulée l'une des batailles les plus meurtrières pour les légions, la fameuse bataille d'Orange opposant les Cimbres, les Teutons et les Tigurins à la République, avec 80'000 pertes romaines. Mais cette bataille, s'il s'agit effectivement d'un sujet passionnant, n'est pas non plus le point central de cet article.

Il s'agit de l'un des deux grands monuments antiques de la ville: l'arc de triomphe d'Orange, l'autre étant le théâtre. Celui-ci a été édifié entre 20 et 25 apr. J.-C. et est l'un des arcs les mieux conservés de France, bien qu'il ait subi des restaurations au cours du XIXème.

Cet arc mesure environ 20 m de long, pour 8 de large et 20 de haut. Il comporte trois baies et a été monté à sec, les blocs étant reliés par des crampons en fer et en plomb. Selon les dédicaces retrouvées sur celui-ci, il a été élevé sous l'empereur Tibère en l'honneur de Germanicus, fils adoptif de celui-ci et décédé peu de temps auparavant.

Ce qui nous intéresse principalement dans cet arc sont les nombreux reliefs gravés sur les différents panneaux des quatre faces. En effet, il a été édifié en commémoration des victoires sur les peuples du Nord, donc sur des gaulois, et va donc être une source iconographique de premier plan pour des chercheurs s'intéressant à l'armement celtique: un excellent complément aux sources archéologiques.

La grande frise de la face Sud est très intéressante: on peut y observer une mêlée opposant des cavaliers romains à des guerriers gaulois. Il est possible d'observer que ceux-ci sont conforme à l'image que les auteurs antiques véhiculent: grands, barbus, allant au combat vêtus uniquement de capes et de leurs armes et désordonnés. Les romains sont eux mieux armés: vêtus de cottes de mailles, et tous portant un casque. On peut observer la très grande ressemblance des casques des deux types de guerriers.

La représentation des boucliers est intéressante, car les gaulois sont équipés avec deux types différents: des boucliers à spina, plus anciens et présents dès les premiers âges de La Tène, mais aussi avec des boucliers à umbos ronds, d'inspiration germanique qui ne se généralisent que durant la fin de La Tène, avec la guerre des Gaules. On voit donc que c'est bien une évolution progressive et que même à cette époque tardive les boucliers à spina ne sont pas abandonnés.

Sur le petit côté Ouest de la face Sud un entassement des armes des vaincus, principalement des boucliers, attire l'attention. On y distingue trois carnyx, ainsi que des fagots de lances et d'épée et des enseignes. Ce relief est très précieux, car il donne une image des décorations des boucliers. En effet, la peinture ne se conservant pas, il est impossible d'en retrouver via l'archéologie. S'il est possible de s'inspirer d'images issues des monnaies ou de la céramique, ce relief donne une image bien plus pertinente de la décoration des boucliers.

Sur la face Nord, il est possible de distinguer des noms inscrits sur des boucliers. Véritable coutume gauloise? Noms de sculpteurs? Nom du légionnaire ayant vaincu un puissant guerrier? Très difficile de trancher. Néanmoins, ces boucliers sont une source d'inspiration pour nous autres reconstituteurs quand vient le temps de peindre nos boucliers.

Bien qu'une fois de plus il faille passer à travers le filtre romain pour accéder aux informations sur les guerriers gaulois, ce type de source est tout à fait précieux, car il s'agit d'un témoignage très proche tant géographiquement que temporellement. Un monument à ne pas rater en cas de balade dans la région donc!

Photos:

J. Demotz et Wikipédia

L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre
L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre
L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre
L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre
L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre
L'Arc d'Orange: les armes gauloises figées dans la pierre
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